mardi 13 mai 2014

Elle n'osa pas déranger le parfait ordonnancement des étagères


   Petit à petit, la pièce rétrécit, jusqu'à ce que la voleuse de livres puisse atteindre les livres à quelques pas. Elle passa le dos de la main le long de la première étagère, écoutant le frottement de ses ongles contre la moelle épinière de chaque volume. On aurait cru le son d'un instrument de musique ou le rythme saccadé d'une fuite. Elle utilisa ensuite les deux mains et fit la course entre les étagères. Et elle rit à gorge déployée, d'un rire haut perché. Quand elle s'arrêta, un peu plus tard, elle recula et resta plusieurs minutes au milieu de la pièce, le regard allant des étagères à ses doigts et de ses doigts aux étagères.

   Combien de livres avait-elle touchés?
   Combien en avait-elle palpés?
  Elle recommença alors, plus lentement, cette fois, la paume des mains tournée vers les livres pour mieux sentir le dos de chacun. C'était un toucher magique, de la beauté pure, tandis que des rais de lumière brillante tombaient du lustre. A plusieurs reprises, elle faillit prendre un volume, mais elle n'osa pas déranger le parfait ordonnancement des étagères.


                       Markus Zuzak, La voleuse de livres
  

2 commentaires:

  1. Etonnant, j'ai vu le livre hier...et n'ai pas osé l'acheter!

    RépondreSupprimer
  2. Moi, j'aurais aimé le trouver pour l'acheter ... Mais Hélas !

    RépondreSupprimer